GEL DE LA BOURSE FAMILIALE : DES 4X4 DE LUXE POUR LES DÉPUTÉS, LA MISÈRE POUR LES RURAUX

L’État est en période de transition, avec des réformes en cours, des audits et des tensions budgétaires réelles. Mais parfois, dans la volonté de bien faire, on peut poser des actes qui méritent d’être reconsidérés à la lumière de leur impact concret sur les plus vulnérables.
Depuis mars 2025, la bourse familiale est gelée. Cela fait maintenant quatre mois qu’on asphyxie nos plus démunis. La bourse sociale, l’une des rares initiatives à impact direct sur les populations vulnérables depuis les indépendances, est gelée !
Ce programme, qui ne représente que 1,3 % du budget national (soit seulement environ 84 milliards FCFA sur un budget de plus de 6 600 milliards), permettait à plus de 600 000 familles pauvres de recevoir 35 000 CFA ($80 CAD) par trimestre.
Même si 90 % de l’argent était détourné ou mal distribué, et l’on peut parier que ce n’est pas le cas, avons-nous pensé à ces 10 % restants, soit pas moins de 60 000 familles, qu’on fait aujourd’hui souffrir ?
Combien l’État dépense-t-il chaque jour pour ses représentations diplomatiques à l’étranger? Combien pour les festivals, festivités et cérémonies officielles ?
Certains affirment, et on a pu le lire ici et là cette semaine, que le montant reçu par les pauvres ne change rien à leur vie. Comme si le supprimer reviendrait à se passer d’une tasse de café. Que non ! Pour une mère de famille seule à Kidira, sans rien à la fin du mois si ce n’est tendre la main, ce petit montant est un game changer. Aujourd’hui, en brousse, pour acheter 1 000 CFA de paracétamol, nos pauvres doivent tendre la main.
Récemment, pour passer le concours de l’ENA, des jeunes ont été exclus pour leur retard. La raison ? Un périple sans fin pour rallier leurs régions à Dakar, simplement pour venir passer le concours. Parce qu’ils n’ont rien. Pour leur retour, ils ont dû quémander de l’argent aux surveillants, sans quoi ils seraient restés bloqués à Dakar. Ces mêmes surveillants (dont A Gaye) qui les ont empêchés de concourir leur ont donné de quoi rentrer.
Chaque jour, des étudiants te contactent sur LinkedIn ou Facebook pour un soutien. Leurs maigres bourses ? Envoyées au village. Et après vérification, ils disent vrai. Quand on n’a rien, ces 35 000 FCFA, c’est une dignité. Ce gel soudain bouleverse des vies et paupérise.
Le paradoxe, c’est que d’autres fonds et programmes, qui, selon le président Diomaye lui-même, posent problème, n’ont pas été suspendus. On pense à la DER, au FONSIS, à l’ANPEJ, au 3FPT ou au PRODAC. Des audits sont annoncés, mais les financements continuent pour eux.
Pour le programme des pauvres, on gèle sans hésiter !
Pourquoi gèle-t-on le seul programme qui concerne exclusivement les sans-voix ?
Est-ce parce qu’ils ne manifestent pas ? Parce qu’ils sont analphabètes ? Parce qu’ils n’ont pas les moyens de se battre ? Parce qu’ils n’ont aucun relais pour défendre leur cause ? Est-ce parce qu’on les utilise pour les élections, puis on les jette ?
Ce gel discret a d’autant plus surpris que c’est grâce aux lanceurs d’alerte que l’opinion commence à en prendre conscience comme Insa C . Et c’est très grave.
Ce qui est encore plus surprenant : ni les députés, ni les partis d’opposition, ni les organisations connues pour défendre les pauvres n’ont tiré la sonnette d’alarme. Ce n’est pas leur problème. On préfère parler du dossier de l’ASER, de l’Aee Power, d’Abdou Nguer ou des employés de la FERA qui font du bruit. Mais les pauvres, eux, n’ont que leurs yeux pour pleurer et leur Créateur sur qui compter.
On n’a pas entendu Barthélémy Dias, Anta Babacar, Amadou Ba, Thierno Alassane SALL , Aïssata Tall Sall ou Papa malick Ndour sur cette question. Ce dernier avait d’ailleurs, lors de la campagne, alerté que le pouvoir en place risquait de couper les bourses. À l’époque, cela avait semblé exagéré. Aujourd’hui, les faits lui donnent raison. Il peut enfin frapper sa poitrine et se remettre en selle : il a maintenant des arguments solides.
Après les véhicules de l’Assemblée nationale, voilà maintenant le coup de massue porté aux plus pauvres. Pour les voitures de l’Assemblée, on nous dit que c’est voté dans le budget, qu’il n’y a aucun moyen de réaffecter les fonds ou de choisir un RAV4 2025 neuf à un prix raisonnable. Mais pour le paysan, même si c’est dans le budget, on peut geler.
120000$ de luxe pour le représentant du peuple pour qu’il aillent lever la main à l’assemblée et zéro dollar pour le représenté dans la misère !
Même les pays les moins religieux au monde ne traitent pas leurs pauvres avec autant de dureté.
Aux États-Unis, malgré plus de 36 milliards de dollars de fraudes dans les aides sociales (Medicaid et food stamps…), le principe est simple : on ne coupe jamais l’aide aux pauvres. On améliore les contrôles, on modernise les systèmes, mais on ne ferme JAMAIS le robinet de la solidarité.
En France, malgré 2 milliards d’euros de fraudes estimées par an, les aides sociales sont maintenues, car on sait qu’une société se juge à la manière dont elle traite ses plus faibles.
Au Canada, les cas de fraudes dans l’assurance-emploi ou les aides Covid ont dépassé le milliard de dollars. Mais jamais Ottawa n’a coupé massivement les prestations.
Alors, une question simple se pose : Pourquoi notre pays, qui aspire à plus de justice sociale, adopte-t-il une méthode sans pitié ? Ce qui est douloureux, c’est qu’au moment où nous nous indignons du deux poids deux mesures du FMI envers les pays africains, nous reproduisons la même logique : celle qui consiste à sacrifier les pauvres qui ne peuvent contester pour sauver l’équilibre comptable.
Monsieur le Président Bassirou Diomaye FAYE , Monsieur Ousmane Sonko , ayons pitié de nos pauvres. Chaque journée compte.
Pensons à la gouvernance des deux Oumar : Oumar Ibn Al-Khattab et Oumar Ibn Abdel Aziz. Reprenons ces versements de la miséricorde, même temporairement, pendant que les audits avancent. Ces prestations aux pauvres, si nous ne les augmentons pas, ne les diminuons pas.
Et craignez le jour où vous serez ramenés à Allah. Alors chaque âme sera pleinement rétribuée pour ce qu’elle aura acquis. Et ils ne seront point lésés. »
Sourate 2, verset 281)
Alioune Camara
Spécialist in Stratégic communication and opérational managemen

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