Badara Gadiaga, la nouvelle dimension populaire

 

La dernière fois qu’autant de monde avait daigné accompagner un citoyen tout le long du trajet pour répondre à la justice, c’était un autre temps, un autre régime. Convoqué par la Division spéciale de la cybersécurité ce mercredi, Badara Gadiaga, chroniqueur de l’émission Jakaarlo Bi sur la Tfm, a connu un accueil populaire.

Une foule s’était donné rendez-vous sur la Corniche de Dakar pour accompagner l’homme vers son rendez-vous avec les enquêteurs. Entre pancartes de soutien et slogans appelant au respect de la démocratie, l’animateur a été porté par des centaines de personnes et de pancartes.«Touche pas à Gadiaga», «La parole libre n’est pas un délit», «Une convocation, un peuple éveillé». Le quotidien l’Observateur revient sur les péripéties de la convocation de Badara Gadiaga qui a obtenu des soutiens de taille.

«Figure montante de la résistance intellectuelle»

Selon le quotidien du groupe Futurs Médias, il y’a eu tant de messages qui confèrent une nouvelle dimension populaire à celui qui est accusé d’être un opposant politique masqué. Si cette convocation faisait suite à des propos jugés polémiques sur le plateau de Jakaarlo, « elle aura paradoxalement servi de tremplin médiatique et politique pour Gadiaga, a indiqué le confrère. En quelques heures, son image a basculé. De chroniqueur clivant à voix emblématique d’un contre-pouvoir assumé. Un « soutien massif, tant populaire que politique, qui semble l’avoir installé dans une posture centrale du débat national, des figures de la culture, des collègues de plateau, des activistes, d’anciens ministres, de députés, mais aussi simples citoyens ont convergé vers les locaux de la DSC. » Pour beaucoup, cette convocation est perçue comme « une tentative de musellement, une de plus dans un climat de crispation entre médias et pouvoir. »

Révélé au grand public par ses analyses sans concession et sa maîtrise du verbe, Badara Gadiaga s’est, au fil des émissions, installé par un ton tranchant, direct, parfois irrévérencieux. Il n’épargne ni l’opposition ni le pouvoir en place. Son style, inspiré des proverbes wolofs et des traditions oratoires locales, fait mouche auprès d’un public friand d’authenticité. Mais c’est depuis quelques mois que sa notoriété a explosé, portée par des prises de position audacieuses sur des dossiers sensibles, notamment l’affaire Adji Sarr-Sonko. Sa convocation n’a pas seulement mobilisé la rue. Elle a aussi provoqué une avalanche de réactions politiques. Des députés Thierno Alassane Sall et Pape Djibril Fall, en passant par les anciens ministres Modou Diagne Fada et Mbaye Dione, ou même des voix de la société civile, plusieurs responsables ont dénoncé « une dérive autoritaire du pouvoir. »

Tous pointent le danger d’un régime qui semble, selon eux, incapable de supporter la contradiction. «Le régime vient de créer un grand opposant», ose même Alioune Tine qui, par ailleurs, qualifie aussi le chroniqueur de «figure montante de la résistance intellectuelle».

Le champ politique, la prochaine marche ?

Face à cet élan populaire, certains voient déjà en Badara Gadiaga un potentiel acteur politique de premier plan. Sa démission en 2021 du parti Rewmi d’Idrissa Seck où il fut responsable de la communication, avait laissé la porte ouverte à de nouvelles ambitions. Mais jusqu’ici, il avait préféré le terrain médiatique. Avec cette nouvelle aura, les ligne pourraient bouger. Des appels

à son engagement politique direct commencent à émerger, tout comme les critiques. Des proches du pouvoir, à l’image de Mame Diarra Fam, l’invitent à sortir de l’ombre médiatique pour se confronter aux réalités politiques.

D’autres l’accusent de populisme et de double discours. Il appartiendra à l’homme de savoir comptabiliser sur cette nouvelle dimension conférée par cette convocation.

L’OBS

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *